GARDER SES TALENTS: L’ART DE LA CHAISE

 

BLOGUE INVITÉ. Combien de fois redit-on aux entrepreneurs l’importance de bien s’entourer? Trouver les gens compétents avec les bonnes attitudes, qui vont s’intégrer à la culture de l’organisation et leur permettre d’évoluer positivement, c’est un art en soi. Si le chef d’entreprise maîtrise cet art, on peut penser que l’affaire est dans le sac. Et pourtant non. Car il faut aussi maîtriser l’art de la chaise, dont on parle moins, soit d’asseoir les bonnes personnes sur les bonnes chaises, tout en ayant la souplesse et la vision d’anticiper les mouvements pour garder les joueurs motivés.

Récemment, j’ai eu l’occasion de discuter avec Victor Henriquez, jeune entrepreneur à la tête de Public Stratégies et conseils, une agence d’affaires publiques à Montréal. Dans ses plus belles erreurs, racontées dans le cadre d’une conférence pour l’École d’Entrepreneurship de Beauce, il disait avoir perdu des employés parce qu’ils avaient fini par accomplir des mandats bien différents de ceux pour lesquels ils avaient été embauchés et se sentaient compétents. Victor avait trouvé de bons joueurs d’équipe, mais il leur avait trop souvent confié une trop grande proportion de responsabilités en dehors de leurs champs d’intérêt.

Ça vous est déjà arrivé? L’entreprise est en croissance, vous acceptez des contrats payants et vous perdez de vue la capacité et les intérêts des membres de votre équipe. En fait, vous êtes peut-être même en train de dire oui à des projets un peu à côté de votre « core business ». Peut-être aussi que votre alignement est trop flou pour vous permettre de choisir vos mandats de manière cohérente. Alors vous commencez à voir les profits à court terme sans penser aux impacts à long terme. Vous acceptez tout ce qui passe et vous demandez à votre équipe de réaliser tous les projets, sans trop d’égards à ce qui nourrit la passion de Josée ou de Henri. Bons soldats, ces deux-là font le boulot. Ils sont rarement dans leur zone d’excellence, souvent dans leur zone d’inconfort. Ils rament et font de leur mieux, mais ne trouvent plus le plaisir. Alors, un beau jour, bye bye boss! Une augmentation de salaire n’y changera rien: Josée et Henri sont juste tannés, fatigués et démotivés. Et ce n’est plus avec vous qu’ils voient un avenir meilleur.

Pourtant Josée et Henri étaient vos meilleurs atouts. C’est peut-être même pour ça que vous avez fermé les yeux: ils étaient fidèles et loyaux, brillants et toujours capables de relever les défis. Ils ne se plaignaient pas, ils acceptaient de faire ce que d’autres refusaient, ils étaient vos meilleurs dépanneurs.

Vous étiez bien entourés. Et vous voilà un peu seuls; tout est à recommencer.

Important pour les PME

Victor a appris de la belle erreur des chaises. Aujourd’hui, il discute avec ses coéquipiers de ce qui les passionne et tend à ce que 80% de leur temps de travail soit dédié à leur zone d’excellence. Il est entouré non seulement de bons joueurs, mais aussi de joueurs tellement motivés qu’ils poussent la croissance de nouveaux créneaux différenciateurs pour son entreprise. Doublement gagnant quand on peut retenir les talents et grandir avec eux!

C’est un défi particulièrement difficile dans une PME, où les occasions d’évoluer dans l’entreprise sont plus limitées que dans une grande organisation. Il peut arriver un moment où la zone d’excellence qu’un employé chérissait depuis quelques années finisse par devenir trop confortable, sans nouveau défi, et alors il faut être imaginatif pour que ses responsabilités restent stimulantes. Le danger, c’est la paresse et l’inaction dans pareille situation. Mais avez-vous les moyens de perdre vos meilleurs éléments?

Connaissez-vous les ambitions de vos joueurs clés? Avez-vous régulièrement des discussions à ce sujet avec eux? En feriez-vous des actionnaires dans votre entreprise si c’était un moyen de les intéresser à plus long terme?

Ces questions vous dérangent? C’est le temps d’avoir une vraie écoute!

Source: les affaires, Entrepreneurs éclairés par Valérie Lesage